par Arvind Gupta | 23 juin 2021
Alors que la majeure partie du monde commence à sortir de la brume provoquée par le Covid-19, il est devenu à la mode et franchement facile de s’en prendre à l’innovation la plus ingénieuse, la plus économique, la plus productive et la plus génératrice de richesses du siècle dernier : les chaînes d’approvisionnement.
Avec l’avènement de la mondialisation dans les années 90 et l’élimination des barrières qui en a résulté pour permettre les flux transfrontaliers de capitaux, de biens et d’êtres humains au cours des trois dernières décennies, les chaînes d’approvisionnement sont devenues plus complexes, interconnectées et dispersées à l’échelle mondiale dans la poursuite incessante de l’efficacité. La plupart des entreprises mondiales ont des chaînes d’approvisionnement comprenant un vaste réseau de fournisseurs primaires de niveau 1 et de fournisseurs de niveau 2 fournissant des composants aux fournisseurs de niveau 1. Dun & Bradstreet a récemment indiqué que 938 entreprises du classement Fortune 1000 avaient des fournisseurs de niveau 1 et 2 à Wuhan, l’épicentre de l’épidémie initiale de Covid-19.
Au début de la pandémie, les populations et les gouvernements du monde entier ont été horrifiés par la ruée vers les produits de première nécessité, les masques, les kits de dépistage et bien d’autres choses encore. Mais après les premières accumulations de papier hygiénique, de pâtes et de boîtes de haricots, les chaînes d’approvisionnement mondiales en « biens essentiels » ont résisté à l’explosion de la demande liée à la pandémie.
Selon une étude récente de The Economist, la production de masques en Chine a été multipliée par dix et la chaîne d’approvisionnement alimentaire mondiale, d’une valeur de 8 billions de dollars, s’est rapidement adaptée, permettant aux supermarchés locaux d’être approvisionnés dans le monde entier. Malgré la rhétorique initiale sur la thésaurisation des stocks par les producteurs mondiaux de vaccins, l’augmentation prévue de l’offre de vaccins n’est rien de moins qu’une réalisation humaine stupéfiante. En dépit des débats sur l’attribution des doses à l’échelle mondiale, les réseaux mondiaux devraient fournir plus de 10 milliards d’injections de nouveaux vaccins cette année.
Alors que les appels à l’autosuffisance et aux chaînes d’approvisionnement nationales se font de plus en plus pressants, il est important de prendre en compte l’ampleur des investissements nécessaires pour créer des réseaux de fournisseurs et des groupements locaux connexes pour tout ce qui concerne la main-d’œuvre, les matériaux et la production, pour lesquels les chaînes d’approvisionnement pourraient facilement s’étendre à un réseau de milliers de fournisseurs. Les gouvernements pourraient subventionner ou tirer parti des droits de douane pour soutenir la création de chaînes d’approvisionnement nationales, mais les coûts monumentaux qui en découleraient seraient inévitablement répercutés sur les consommateurs, ce qui aurait pour effet d’augmenter le prix de tous les produits, des téléphones aux vêtements et aux chaussures.
La sécurité nationale est importante, mais ce serait une erreur de s’engager sur la voie de l’autosuffisance au détriment de l’efficacité. Au lieu de cela, les gouvernements et les entreprises du secteur privé devraient examiner les chaînes d’approvisionnement d’un œil critique, tester leur résistance et leur agilité face aux futurs chocs mondiaux, et élaborer un plan à long terme pour s’orienter vers diverses sources d’approvisionnement, en particulier pour l’acquisition d’intrants essentiels afin de réduire les points d’étranglement dans l’ensemble des chaînes d’approvisionnement.
À court terme, les entreprises devraient s’engager de manière globale avec leurs fournisseurs, partager des données en temps réel sur la demande des clients, surveiller en permanence leur capacité de production et l’approvisionnement en matières premières afin de résoudre de manière proactive tout problème de livraison.
En fin de compte, même la saga de l’Ever Given coincé dans le canal de Suez, l’un des récits pandémiques populaires des maux de la chaîne d’approvisionnement mondiale, ne sera rien d’autre qu’une parenthèse dans les statistiques du commerce mondial.
